De la naissance d'un blog

Aux toilettes, par un bel après-midi d'été.

Entre deux GTO et tranquillement installé sur le trône, me voilà plongé dans la lecture de Teacher Man, de Frank McCourt. A ce moment précis, je suis dans l'expectative. On est en juillet, la rentrée est dans deux mois et je n'ai aucune idée ni du lieu où je vais être parachuté ni du type d'élèves dont je vais avoir la charge.

Petit flash-back. Juin 2008.

Après une nuit blanche, j'apprends que je viens d'être admis au CAPES d'anglais. Je ne réalise pas encore vraiment tout ce que cette information implique. Ce qui m'intéresse, c'est que les études sont finies, que je vais pouvoir fêter ça et que je vais enfin commencer à gagner ma vie en faisant le boulot que j'ai choisi. Et, bien sûr, en plus de la sécurité de l'emploi, il y a les vacances! Mesdames et messieurs, faites place, j'ai 26 ans et je suis fonctionnaire de l'Education Nationale!

Retour aux toilettes.

Fin du chapitre et début des questions. Et moi? Qu'est-ce que je ferais si un gamin jetait son sandwich à travers la classe? Mieux: un élève se lève et me balance un gros mollard à la tronche. Je lui crève les yeux avec un compas? Je repense au programme du CAPES: Pride and Prejudice, The Grapes of Wrath, The Tragedy of Coriolanus, la dévolution des pouvoirs à l'Ecosse et au Pays de Galles de 66 à 99. Entre autres... Ok, j'ai le concours. J'ai su écrire à un instant T sur une copie officielle que le héros éponyme de Coriolan déclamait avec fougue à la plèbe de Rome: "I bannish you", dans telle scène de tel acte, et ce à la ligne près. Je me vois bien dire ça au caïd qui vient de me cracher dessus pour impressionner ses copains! Concrètement, toutes ces connaissances vont-elles faire de moi un bon prof? Est-ce que moi aussi, comme McCourt, j'écrirai un bouquin pour raconter mes galères d'enseignant quand j'aurai cotisé pendant 41 ans devant des générations d'élèves? Et pourquoi pas commencer maintenant?

Nous y voilà. Ce blog est un journal, un recueil de mes billets d'humeur. Les sujets? De mes rêves sur ce beau métier à la dure réalité en passant par les perles des élèves et mes propres gaffes, sans oublier ce qui se raconte en salle des profs... Il devrait y avoir de quoi faire.

Une seule règle: pas de noms. Ni celui d'un prof, ni celui d'un élève, d'un lycée, d'un collège, ni même le nom d'une ville. L'anonymat protège et, dans une profession où l'on recense 60 cas d'agressions physique ou verbale chaque jour, cette protection est la bienvenue. Enfin, au pire, j'ai toujours une réplique toute prête sous le coude...